CRITIQUE DU LIVRE « VIANDE » DE NOËLLE MICHEL — NOIR POLAR AUX CONFINS DU SPÉCISME
« Il s’arrêta à l’ombre d’un magasin et cligna des yeux. Il regarda dans la devanture. Aperçut de minuscules créatures dans une cage. Achetez un bébé de Vénus pour votre enfant, conseillait une pancarte. Il regarda ces petites créatures à tentacules dans les yeux et y lut l’intelligence en même temps qu’une détresse implorante. Il passa son chemin, honteux de ce qu’une espèce était capable de faire subir à une autre »
p.154 in « Frère de la machine » dans Nouvelles 1. 1950 – 1953, Richard Matheson
« Elle transpirait là, la magie humaine, dans ces bras tendus, dans ce regard implorant, dans ces mamelles arrogantes, dans ces jambes écartées, dans ce ventre offert. Il lui fallait maintenant sceller sa réconciliation avec son monde. »
p.477 in Les fables de l’Humpur, Pierre Bordage (1999)
« Les innocents, ça n’existe pas. Par contre, il existe différents degrés de responsabilité. »
in Millénium, Tome 2 : « La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette » Stieg Larsson (2006)
Ouverture du roman Viande : une femme enceinte est séquestrée et torturée. Nous sommes dans un pur thriller, tout du moins à ce moment-là du récit.
« J’aperçois mon reflet dans les verres de ses lunettes carrées : une montagne de chair blême et flasque, presque impossible à bouger. » (p.9)
Viande s’avère être le dernier morceau de bidoche que nous avons dû avaler, invité-e-s par Noëlle Michel, l’écrivaine à qui l’on doit cette rata-là, à la recevoir et la déguster de la première à la dernière bouchée, comprenez : du premier au dernier mot. Et il faut bien reconnaître que c’est avec délectation que nous nous sommes réimprovisé-e-s sarcophages pour engloutir toute cette nouvelle cuisine. Eh bien nous nous sommes plutôt régalé-e-s. Viande est de ce genre de littérature de résistance qu’on ne lâche que lorsque tout est consommé, encore qu’il faille certainement un certain temps pour en faire la digestion. En effet, menée de plus en plus tambour battant, cette histoire ne laisse pas indemne par sa force à vous projeter tant dans la peau de ses personnages que dans la peau de… oh la ! attendez, wait a minute, on ne va pas vous donner toute la recette comme ça. Bon alors, une femme enceinte, de la torture, c’est quoi ce pitch ? À quelle sauce en tant que lecteur-ice-s, Noëlle Michel compte-t-elle nous assaisonner ? Lire la suite
SIDÉRALE BARBAQUE — CRITIQUE DU LIVRE « VIANDE » DE NOËLLE MICHEL — NOIR POLAR AUX CONFINS DU SPÉCISME
