DES INVASIONS CARNO-SPÉCISTES — POUR LE « STEAK BARBARE » DE GILLES LUNEAU — ÉGOISME INUTILE

DES INVASIONS CARNO-SPÉCISTES — POUR LE « STEAK BARBARE » DE GILLES LUNEAU
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J’ai dévoré force moutons.
Que m’avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m’est arrivé quelquefois de manger
Le Berger. Je me dévouerai donc, s’il le faut ; mais je pense
Qu’il est bon que chacun s’accuse ainsi que moi :
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable périsse.
– Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce,
Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur
En les croquant beaucoup d’honneur.
Et quant au Berger l’on peut dire
Qu’il était digne de tous maux,
Etant de ces gens-là qui sur les animaux
Se font un chimérique empire.
Jean de La Fontaine (1621-1695), Fables, 1678-1679.
« […] comment un individu peut construire de manière autonome des structures de contrôle sur la base de sa propre histoire personnelle. »
p.183 in Comment l’esprit vient aux bêtes. Essai sur la représentation (Joëlle Proust — 1997)
« The lunatic is in my head
The lunatic is in my head
You raise the blade, you make the change
You re-arrange me ’til I’m sane »
Brain Damage in « The dark side of the moon » (Pink Floyd — 1973)
   En janvier de cette année les éditions l’aube et la Fondation Jean Jaurès ont permis à Gilles Luneau, journaliste, essayiste et réalisateur, de crier haro sur le baudet, ou de jeter l’opprobre sur ces tordus de « végans » si vous préférez, en publiant Steak Barbare. Hold-up végan sur l’assiette en butte à pourfendre toutes velléités animalistes. Rien que ça. Et dire qu’on va commenter ça… Et si on faisait une vidéo « retour de courses » plutôt, non ? Trop bien ! Non non, stop, chacun son truc. Le nôtre ? Traquer les incohérences, les impostures et les mauvaises langues. Après Luc Ferry, Michel Onfray, Paul Ariès, Etienne Bimbenet, Pierre-Etienne Rault, Marianne Celka, Stanislas Kraland, Jean-Pierre Digard, Francis Wolf, etc., nous voici une nouvelle fois avec une pépite antivéganes entre les mains en guise de game of thrones… rigolez pas : en cas de reconfinement ça peut servir si le PQ vient à manquer !

   Cela dit, il faut rendre à César ce qui appartient à César. Pour un ouvrage contre le véganisme, contre l’antispécisme et contre la viande in vitro, pour un livre pour le petit élevage paysan plein de nostalgie comme une vieille pub de jambon Herta, un livre finkie-porchéen en somme, eh bien c’est souvent un sacré bon bouquin. Le travail d’investigation est passionnant. À nous qui avions lu Clean Meat de Paul Shapiro et vous en avions parlé ici même, il faut reconnaître que Gilles Luneau, par son enquête de terrain fouillée, nous apporte beaucoup d’informations très intéressantes sur la question. Il laisse même très longuement la parole aux interviewé-e-s, quitte à ce que ses propres arguments critiques peinent vraiment à démettre ce qui vient d’être dit, et il en va de même lorsqu’il interroge des non-sympathisants de la cause animale qui admettent comme fort recevables beaucoup des idées de la militance animaliste. Loin de nous faire changer d’avis au sujet de notre véganisme, ni de notre antispécisme, Gilles Luneau aura au moins réussi à nous renseigner sur des pratiques financières assez curieuses dont on avait déjà entendu parler, mais dont il faut dire tout de suite qu’elles ne sont certainement pas l’apanage de la mouvance végane internationale. C’est qu’aujourd’hui, faire des affaires, c’est une histoire d’altruisme efficace. Quoi ? c’est l’inverse ? Oui, ok, bon c’est kif kif bourricot quoi. Qui sauve un œuf sauve un bœuf, qui sauve un noir nous redonne l’espoir, pourrait être un slogan de ces nouveaux chevaliers de l’économie mondiale. Nous ce qu’on en dit, c’est que pour faire le bien il faut commencer assez simplement par ne pas faire le mal. C’est tout bête hein ? Ce n’est donc ni une affaire de business, ni une question de réminiscence culturelle. On dirait même : au contraire !
   « Aux dix-mille ans de compagnonnage entre l’être humain et l’animal » […] Quand ça commence comme ça tu sais que la lecture ne sera pas toujours agréable. Dès le début l’auteur veut nous faire croire que le véganisme est la déconstruction de la représentation  du modèle alimentaire traditionnel, qui en réalité est déconstruit depuis belle lurette. Pour bonne part de nos jours les paysans aux valeurs d’antan sont des néoruraux et les gastronomes des nantis. La vraie bonne cuisine est chère et on se demande qui sont ces « simples citoyens de culture européenne » dont parle Luneau, et qui n’ont pourtant absolument pas cure de ces dix-mille années de traditions diverses basées sur la domestication animale ?
   Ami de longue date du célèbre démolisseur de Mc Do José Bové, Gilles Luneau, bientôt 70 piges au compteur, entend bien faire savoir quel avenir sombre se dessine à cause de ce qu’il appelle — à la suite ou aux côtés de Paul Ariès — des « végans » en omettant d’avoir vérifié l’orthographe officiel dans les dictionnaires récents. Car oui, le « végan » est un être d’une grande dangerosité pour votre avenir qu’il s’apprête à saccager comme on déglingue au tracteur une franchise de fast-food à Millau. Toutes fourches dehors !!! Pour Luneau, il s’agit, comme pour la plupart des plus virulents détracteurs du véganisme et de l’antispécisme, de défendre le modèle fantasmé qu’une grande prêtresse éleveuse de chèvres et sociologue à ses heures perdues aura inventé pour eux dans un moment de chaleurs intenses en proie à combler un vide infantile suranné, quitte à réinventer ce qui n’a jamais tout à fait existé. Ah la coquine ! elle en a fait des émules ! vous devinez qui ?
   Attention toutefois, très bien documenté on l’a dit, cet essai va assez loin dans la méta-critique, mais justement l’on perd proprement le sens de celle-ci, puisque pour casser du végane il faut démolir tout le système. Ainsi Gilles Luneau n’est pas tendre avec la FNSEA qu’il tance sévèrement pour avoir incité les paysans français après la Seconde Guerre Mondiale à brader leurs sabots pour des bottes en caoutchouc et leur savoir-faire ancestral pour du Round Up. Toutefois, d’emblée la confusion mentale de l’auteur apparaît puisque, refusant d’entendre les cris des bêtes qu’on abat, il rétorque que personne ne s’est ému d’hybrider les légumes pour qu’ils satisfassent les contraintes techniques de la machine qui les récolte, les trie et les emballe[1]. Ça pourrait sentir le cri de la carotte mais c’est plus subtil. Ici le silence des végétaux rejoint celui des agneaux, …et Hannibal Gilles Lecter court toujours… bref. À sa façon, non sans faconde d’ailleurs, notre Gilou nous joue ce petit air d’accordéon biocentriste mais point trop n’en faut dans le soufflet, les ami-e-s de la poésie apprécieront : « Et l’être humain n’est qu’une des expressions de la vie sur Terre, parmi des millions d’autres, ni au-dessus, ni en dehors. » (p.12) Et aussitôt Luneau déclame que l’Homme s’est toujours arrogé un certain titre de supériorité et qu’on ne va pas non plus en faire un drame, tous les grands systèmes sont anthropocentristes : la Renaissance, la pensée des Lumières, l’empirisme, le positivisme, l’humanisme, le marxisme, etc., tous ont revendiqué ce « postulat de la supériorité de l’humain sur la nature » (idid.) Eh oui, que voulez-vous ? Ordem e progresso, mais charité bien ordonnée commence surtout par soi-même… Par le petit bout de sa lorgnette, notre Luneau ne voit pas du tout d’un bon œil la lutte pour les droits des animaux. Un autre progrès pour réparer un vieux modèle qui a fait son temps ? Foin foin foin ! L’élevage industriel pollue l’eau douce, l’air, la mer, et esclavagise éleveurs et animaux ? La Technique va fournir des cuves à lisier, des injecteurs pour enfouir les excréments à la bonne dose au bon endroit, des méthaniseurs pour produire de l’énergie ; l’éleveur pourra emprunter pour automatiser les tâches les plus pénibles, les animaux auront quelques centimètres carrés de plus pour bouger, et les élus locaux, du matériel dédié au ramassage des algues vertes. Fort sceptique et généralisant sur les capacités bienfaisantes de la technè — comme avant lui d’autres tels Heidegger, Horkheimer et Adorno, Günther Anders — l’auteur tire rapidement ses conclusions illico en accord son idée initiale que la science, par définition, c’est un questionnement, pas des solutions pratiques. La science est une quête pour tenter de comprendre comment fonctionne le monde[2], aussi se passer de bonne viande d’élevage rustique, pensez-donc… Les « produits phytosanitaires » cachent bien les pesticides. Dans La dialectique de la Raison, Theodor W. Adorno et Max Horkheimer[3] écrivaient que les hommes remplacent le concept par la formule, et perdent ainsi le sens premier dans leur quête de productivité éternelle. La ratio pure induit une forme de rationnement de la pensée et de la pensée critique. À nous aussi déconstruire les abus de la mécanisation du monde nous importe. Néanmoins, considérant l’attachement systématique des animaux à ce système, nous remontons jusqu’à ses origines et ne pouvons pas, tenant compte également des intérêts à vivre des animaux, ne pas nous opposer à la fois à l’élevage industriel et à la fois au « petit élevage paysan ». Intensif ou extensif, l’élevage, le cœur de notre réflexion est l’animal individué. Et sinon qui s’est laissé berné par les lumières de l’industrialisation sinon les paysans eux-mêmes rêvant de s’embourgeoiser dans la logique de la propriété terrienne abondante, rapportant monnaie sonnante et trébuchante ? Et hélas, chaque fois que Gilles Luneau ouvre la bouche, c’est pour vomir d’une plumitive façon des aberrations plus grosses que lui. De la sorte, le voilà mettant — mais chez lui c’est finalement bien naturel — la charrue avant les bœufs : La division du travail qui avait réussi à la métallurgie et à l’automobile, non sans résistance ouvrière, s’épanouit à la ferme, avec l’engouement de la Profession […] (p.18) Bien vu mais c’est assez inexact dans la chronologie. Comme le rappelle fort bien Jacques Damade dans son livre Abattoirs de Chicago[4] : « Le train allait d’une part permettre d’acheminer le bétail beaucoup plus rapidement vers Chicago, et d’autre part expédier les bêtes transformées en viande de Chicago vers les villes consommatrices du pays. » C’était vers la fin des années 1860. En réalité c’est le fordisme (la Ford T = 1908) puis plus tard le toyotisme qui se sont inspirés de l’abattage à la chaîne. D’abord l’humain enchaîne les animaux, puis voyant que c’est productif il reporte le système sur ses congénères. La ferme devient à son tour, après l’avoir engendré par ses prétentions exploitantes, une antichambre mécanisée de l’abattage sérialisé.
  Nombres d’approximations et d’idées préconçues n’arrêtent pas pour autant ce cher Gilou, loin s’en faut, cela l’encourage. Ayant planté son fallacieux barnum, notre bonhomme peut commencer à s’en prendre à la viande in vitro (nous n’avons pas peur de ce mot) pour le dénoncer au même titre que les déplorables erreurs industrielles du passé et du présent récent. […] le steak haché de Mark Post introduit la possibilité de s’affranchir des contraintes de la nature (chasse, pêche, agriculture) pour se procurer des protéines animales. Une révolution dans la façon de manger[5]. Ah oui vraiment ? C’est surtout une révolution dans la façon de traiter les autres êtres vivants et en l’occurrence les animaux domestiques et ceux dits gibiers. La finalité dans l’assiette elle, ne change pas : même viande, même tradition, même cuisine, même sauce. Bien sûr, lorsque Luneau écrit qu’on désire « s’affranchir des contraintes de la nature », cela pour parler du steak in vitro, ne voit-on pas clairement que la remarque s’applique historiquement en premier lieu à l’élevage. Il y a 10000 ans, c’était bien en vue de s’affranchir des contraintes naturelles (hiver, manque de nourriture, praticité) qu’on a élevé les animaux. Aujourd’hui on veut s’affranchir des contraintes de l’élevage subies par les animaux, et par les employés des abattoirs, sans parler des contraintes écologiques ; c’est ce qu’on appelle l’évolution, la recherche du progrès aussi. On n’échappe donc pas à la hâtive critique des faux œufs « aliment(s) ultra transformé(s) », « alors qu’en est-il de la viande et de la transsubstantiation de l’animal » demande l’invectivant investigateur en quête de sérieux (p.34). Une fois encore, l’invocation de la nature prévaut dans son discours volontairement naïf alors que le propre de l’homme est d’être un être antinaturel. Luneau tente d’induire également des biais représentationnels quand il évoque au chapitre 3 les croquettes véganes pour animaux alors que là n’est pas le sujet de son livre. Il cherche à tous prix à discréditer véganisme et antispécisme. Manque de bol, mal renseigné sur la société Wild Earth dont il déclare qu’elle est la première sur ce marché, vérification faite il a tort puisque Benevo existe depuis 2005, avant Wild Earth.
   De temps à autre — c’est là aussi tout le sel et le piquant de cette rata-là — Gilles Luneau perd tout seul son sang-froid. Une envie pressante le fait sortir de ses gonds et il verse dans une forme de poésie cynique bien à lui, exemple p.37 : « J’imagine que les végans qui ont perdu, voire jamais connu, le goût d’une véritable omelette, doivent vivre, avec Just Egg, une expérience gastronomique et un flirt avec l’interdit, désormais passé, du péché originel. » Si ça ce n’est pas à la fois du mépris et l’expression d’une bêtise crasse témoignant son ignorance des véganes en tant que personnes, alors qu’est-ce que c’est ? Du journalisme gonzo ? Ah ! Et ça continue encore et encore, p.60 c’est que le début d’accord, d’accord : « Des champignons pour les chiens, des carnivores ? » Bzzzz !!! Faux ! Les chiens sont des omnivores. Hey Gilou, tu savais que tu pouvais donner de la pastèque à ton chat ? Et puis en pensant faire un bon mot en critiquant la destination anthropomorphique des croquettes, tu oublies que ces friandises ce n’est pas le fait des véganes mais que toutes les friandises pour animaux s’adressent in fine aux humains qui les achètent, comme celles à la viande et au yucca, par exemple.
   Ailleurs l’enquêteur pleure sur la disparition des champs en hydroponie (cf. pp.67-68). Mais quel est le mal encore une fois si la science permet aux hommes de se nourrir de façon massive avec le moindre impact sur les écosystèmes et les autres vivants ? On pourrait même imaginer que cela s’accompagnerait d’une technologie qui affranchirait du travail salarié et contraint. Mêlant tout et n’importe quoi avec pour objectif la mise en avant de l’élevage d’antan pour les élites d’aujourd’hui, Luneau avance qu’auparavant les organisations poussaient les consommateurs à modifier leurs habitudes alimentaires en disant que leur pratique était mauvaise pour l’environnement. Ça ne marche pas. Les gens ne veulent pas entendre que ce qu’ils font est mal. Le nouvel écosystème repose sur la création de produits dont le goût est tout aussi bon, voire meilleur, que le produit que l’on veut remplacer, [etc.] [6]. Il ajoute un peu plus loin que toute l’habileté — et la duplicité intellectuelle — du mouvement végan est de se saisir de ces deux faits indéniables pour instrumentaliser l’ensemble de la population non pas pour tenter de la rallier à la diète, ce serait pure folie mégalomaniaque, mais pour s’en servir de levier pour alléger ce qu’ils estiment être de la souffrance animale[7]. Et enfin selon lui, il résulte que nous avons donc affaire à deux dynamiques complémentaires : d’une part, la contestation du modèle agroalimentaire industriel, avec pour conséquence son déclin annoncé ; d’autre part l’idéologie antispéciste des végans qui pousse ces derniers à imaginer les stratégies en mesure de sauver le maximum d’animaux domestiques de ce qu’ils estiment être un esclavage honteux. Autant végétariens et végans se contentent de manger leurs légumes, autant le quidam ne renonce pas facilement à son bifteck ou à sa poule au pot. Liant frauduleusement véganisme et flexitarisme (bobo, cela va sans dire…), il conclut qu’en Europe on veut […] faire croire aux omnivores que nous sommes tous de naissance (appréciez l’étrange tournure), que nous sommes des végé en puissance…[8] Une nouvelle fois c’est historiquement faux. En France, le courant flexitarien est apparu avec la tendance « paléo », laquelle, au contraire, est une alimentation qui insiste sur notre descendance avec les chasseurs-cueilleurs. Chasseurs… cueilleurs… pour la critique objective Gilou tu repasseras, question de point de vue.
   Vous l’aurez compris, les vilains « végans » n’ont qu’une idée en tête, suppôts du Mal absolu, Frankenstein délurés qu’ils sont, ils ne pensent qu’à « s’ingénier à modifier la vie » (cf. p.92) quand ils font la promotion de viande sans viande (plant based) ou de la viande cellulaire également appelée viande propre (clean meat). Ouh laaaaa… wait a minute papillon : le propre de l’élevage, à part mettre ses copains dans des enclos après leur avoir fait signer un contrat imaginaire, ne serait-ce pas — juste comme ça par hasard hein ! — de pratiquer la sélection et la modification génétique par reproduction, que ce soit pour la viande ou les animaux de compagnie ? On le redit ici une bonne fois pour toutes pour que les récalcitrants comprennent bien : L’ÉLEVAGE EST DU TRANSHUMANISME ; L’ÉLEVAGE EST « CONTRE-NATURE »… comme son inventeur : l’Homme.
   « Mais quand c’est plié, c’est plié ! » dirait Gilles Deleuze. Notre Gilles à nous ne veut pas que nous jeter des oranges à la face, il voudrait bien nous foutre en taule avant. Car en effet, l’ensemble des personnes dont il fait les interviews aux USA, lui parlent de la souffrance animale à éviter, des problèmes écologiques (pollutions) liés à l’élevage, etc. Cette (très longue) partie du livre est, il convient de le rappeler pour être honnête, passionnante et très instructive. Bravo Gilles. Mais pourquoi es-tu si méchant ? Parce que !!! Parce que quoi ? Parce que quand plusieurs personnes te font des réponses similaires sur leurs intentions politiques, écologiques et économiques, tu trouves ça spécieux ? « … je vais hélas retrouver ce sentiment d’argument copié-collé tout au long de mon périple », dit Luneau p.99 en évoquant lui-même une sorte de « paranoïa du journaliste ». Tout de même, il lui tient à cœur de défendre son (très français) point de vue : « Je souligne ma vision globale du problème et lui soumets le fait qu’en Europe des personnes, des mouvements, défendent une vision locale, territoriale, de la nourriture pour résoudre les problèmes posés par l’industrie alimentaire. Que le gouvernement français soutient des projets territoriaux. Que ce type de politique vise l’autonomie maximale d’une région. Qu’il y a une grande différence entre la vision globale de « quelqu’un qui nourrit le monde » et la vision locale d’un système territorial nourrissant une région. » (p.102) Rien n’y fait quand tout ou presque lui est dévoilé, expliqué, démontré, lui veut de l’élevage à la ferme comme en 1780, et Marie-Antoinette avec des moutons au Petit Trianon en prime pour parfaire le décor sans doute… mais ça sonne tellement vieillot et… inutile pour nourrir le peuple (planétaire), et il le sait bien ce bougre de manant gratte-papier. Et toujours les amalgames iniques et trompeurs : Pourquoi des gens, sympathiques, dont beaucoup de jeunes, avec plutôt de bons niveaux d’études, cèdent-ils aux sirènes de l’antispécisme ? Pourquoi cette fuite en avant biotechnologique ? […] sans transmission de la coévolution homme-nature, sans aucun vécu de la place de l’être humain dans la nature et de ce que celui-ci doit à celle-là ? […] Je ne suis pas complotiste, je ne spécule pas sur des liens imaginaires[9]. Bah quand même un peu. L’antispécisme lutte contre une injustice de plus en plus flagrante et de moins en moins évidente, il faut vivre avec son temps. Ces gens sont sympathiques et ayant de la sympathie ils en éprouvent aussi pour les animaux. Où est-il écrit qu’on ne pourrait pas continuer à coévoluer sans plus dominer, abattre et consommer la chair des animaux et leurs sous-produits ? La réponse c’est : nulle-part. Sauf dans les esprits laïcs et / ou religieux tout englués dans les atavismes culturels jamais remis en question et leur illusio. Mais bien entendu, et hélas ! Gilles Luneau reste focalisé sur ses culottes courtes, ses godillots, les Mistrals gagnant et le cochon qui chiale avant qu’on le saigne. Ah la la ! les merveilleux souvenirs d’enfance ont la peau dure, comme un bon cuir vachette, pas vrai ? Juste une chose : il ne faut pas oublier de grandir. Et ne grandissant pas mais s’engluant dans la mare au canard de la ferme, Gilou repense aux boches dont il a entendu parler longtemps quand il était jeune. Du coup il se dit que bon sang mais c’est bien sûr ! l’antispécisme, tout ça là, c’est une idéologie au vertige totalitaire[10].
   On résiste pas à vous livrer un petit extrait résumant la belle pensée éclairée de l’auteur :
   Fort de son travail d’enquête et de sa rencontre avec des acteurs majeurs des start up de l’industrie de la viande cellulaire, Gilles Luneau ne peut que faire le constat que cette nouvelle industrie a le vent en poupe, toutes proportions gardées au vu de la situation du marché alimentaire mondial actuelle, et que les entreprises historiques du secteur de la viande elles-mêmes sont en train de changer leur fusil d’épaule : Désormais, les leaders mondiaux de la viande parlent d’eux-mêmes en tant que « producteurs de protéines »[11]. Pour l’auteur, qui est très remonté contre ce qui s’avère peut-être (on ne sait pas encore) être un des modèles alimentaires les plus importants pour l’avenir de l’Humanité, c’est inconcevable et l’on verse presque avec lui dans l’idée d’un scénario tout droit sortie de la série des années 60 Les Envahisseurs : « La dynamique est bien installée, d’un remplacement […] » écrit Luneau p.161. Le mot, lourd de sens, est lâché. « Le remplacement » est ici appliqué à l’élevage certes, mais Renaud Camus n’est pas loin avec ses idées complotistes xénophobes et révisionnistes… On reconnaît bien là cette peur agitée par des vieux et vieilles réacs qui ne comprennent plus le monde dans lequel iels vivent, Michel Onfray lui-même (prétendument libertaire) a récemment viré sa cuti « camusienne », abandonnant Albert pour flirté avec Renaud. Mais le fond du problème, c’est que Gilou, comme tous les autres, n’en démord pas de la barbaque arrachée sur le dos des bêtes et pour laquelle il salive abondamment qu’il lui faut un bavoir. Nourrir tous les humains, finalement peu importe. Éviter que des animaux soient traités comme on sait, finalement peu importe. L’important, c’est que cette chair de culture n’a pas le vécu singulier d’un animal, avec sa nourriture, ses hormones, des joies et ses peines au long de sa vie[12]. Au moins c’est franc. Monsieur veut croquer de la bestiole, de la vraie de vraie. De la bestiole qui a respiré, couru, brouté, fait caca et eu des émotions vraies. Et c’est là, mais quel-le antispéciste sera surpris-e par ce biais de penser totalement fou et digne du végano-sceptique, qui induit, pour dire les choses sans ambages, que nous ne pouvons accepter notre mort prochaine qu’en s’y exerçant en tuant les animaux ? Eh bien Gilles Luneau n’hésite pas un instant : « Dans une nouvelle société où les animaux ne doivent pas mourir pour nourrir les gens, où est le lieu de la mort ? Où la mort existe-t-elle dans l’éducation ? » (p.201) Et pourquoi ne pas s’entraîner à penser la mort en flinguant de vieux journalistes tout moisis ? […] Ou bien — comme quoi les choses sont bien faites cher Gilou — est-on forcément tenté de rebondir sur les démonstrations de culture censées nous faire comprendre qu’on ne sait pas de quoi on parle à propos de la vie lorsqu’on défend les animaux. Car selon Luneau, on retrouve le suffixe zoi dans protozoaire, hydrozoaire, métazoaire, zoo, zootechnie, zoologie, épizootie[13], […] tiens donc ! les zoonoses dues aux élevages intensifs et à la destruction rapide des biotopes comme la CoVid-19, on en parle ?
   Il y aurait, d’un point de vue socio-psychologique, un travail intéressant à réaliser autour de cette notion d’acceptation de la mort si et seulement si on tue des animaux. C’est assez délirant comme argument, comme si voir nos proches mourir depuis l’enfance n’était pas suffisant pour se préparer soi-même ? Gilles Luneau verse alors dans une représentation littéralement science-fictionnesque de la chose, sans aucun doute liée à son rejet de toute forme de progrès allant au-delà de l’invention du tracteur : « À écouter les végans, je trouve qu’ils ne pensent pas, pas plus qu’ils ne laissent de place à la mort… Pensent-ils qu’ils vont vivre éternellement ? Quand on doit tuer pour manger, on apprend la place de la mort dans la vie. »[14] (p.222) C’était prévisible, au fur et à mesure de la lecture, l’essayiste s’enfonce dans des jugements à l’emporte-pièce qui ne sont que le reflet de sa fermeture d’esprit et son archaïsme culturel et personnel. Lorsqu’un de ses interlocuteurs lui explique avec aménité qu’après donc 10 000 ans de domestication le processus cellulaire qui a lieu dans le corps du bœuf, [et] nous le reproduisons de manière contrôlée[15], Luneau ne trouve qu’à redire obstinément que « les végans » ont non seulement la trouille de mourir, mais ils ne s’y résolvent pas[16]. C’est absurde mais l’auteur ne se rend manifestement pas compte de l’énormité de ses propos. Mais il y a pire, c’est lorsque Gilles Luneau parvient à laisser Nicklas Bostrom, philosophe et transhumaniste de renom, dire qu’on pourrait « élever un poulet sans cerveau, ce ne serait pas un problème éthique pour moi, et, pour être cohérent avec la logique de Peter Singer, ce ne serait pas non plus un problème pour lui. » (p.241) Il nous faut ici réagir et affirmer avec force que nous nous opposons à ce type d’idées et de projets révulsant. Pour comprendre, lisez nos articles sur le roman Le cœur de Dolly ou encore sur un drôle d’anarchisme. Ce que Luneau ne comprend pas, c’est que la majorité des véganes ne sont pas tou-te-s pro-technologies et cherchent elleux aussi à vivre proches des éléments de la nature. Ainsi la viande cellulaire n’est pas du tout une fin en soi pour les personnes ayant appris (très bien) à se nourrir en se passant de produits animaux. Pourtant Luneau croit deviner toute la répulsion végan pour le vivant, forcément sale et malsain[17] quand on avance que la clean meat évite les gros problèmes et scandales sanitaires. Ce type choisirait sans doute de se faire opérer dans les tranchées plutôt que dans un hôpital moderne, faut-il croire.
   Enfin, juste avant d’avancer que les vins véganes sont de mauvais vins, de la piquette[18] — ce qui fera plaisir aux viticulteurs et viticultrices qui produisent sans collage ou filtration animale mais ne sont pas elleux-mêmes véganes —, notre croisé-journaliste nous dévoile toute l’horreur du plan de contrôle de la planète totalement machiavélique qu’ourdissent les antispécistes et consorts : « […] selon les végans, le flexitarien est une personne à laquelle on prête l’intention de réduire sa consommation de viande, voire qui pourrait un jour rejoindre leurs rangs. » (p.262) Le « végan » en général (nous le sommes donc plutôt légitimes pour dire comment on considère le flexitarien) conchie le fexitarien. Le flexitarien est de ton côté loulou, il aime la bonne vian-viande bien élevée chez les éleveurs extensifs que tu défends, et il y tient mordicus à sa carogne. Ingrat que tu es, mépriser ainsi ton allié de papilles… Effectivement, les entrepreneurs qui se lancent dans l’alimentation végétale préfèrent dire qu’ils s’adressent à un large public pour avoir des chances de vendre leurs produits et être économiquement viables (miser uniquement sur la poignée de « végans » comme potentiels clients c’est un peu casse-gueule). Mais sinon le flexi bibi, vraiment on insiste, on te le laisse. On t’a même trouvé un p’tit site sympa pour te montrer que les flexi sont tes amis (d’ailleurs, ils sont déjà les potes de Paulo) : Naturellement Flexitariens.
   Bref ; vers la fin de l’ouvrage — car heureusement tout a une fin — Gilles Luneau, notre nouveau poto, convoque des « experts ». On vous la fait courte, un docteur fort sympathique au demeurant, appelons-le Lylian, déclare p.305 à propos de la B12 : « C’est le seul problème pour un régime intégralement végétal, il ne faut pas être végétalien strict, ou alors consommer aussi des algues qui en contiennent. » Oh la la, on se doit de rectifier ce cher Lylian. Non mais tu comprends, ton enquête sur la viande cellulaire est tellement bien menée et tes interlocuteurs « végans » sont tellement convaincants avec leurs arguments, qu’il faut envisager la possibilité que quelques-uns de tes lecteurs vont rejoindre le camps de ces damnés capitalistes altruistes zoophiles pétés de thunes et donc faut pas jouer avec leur petite santé. Docteur Lylian est gentil avec l’alimentation végétale mais en même temps il dit des âneries. Les algues contiennent de la B12, c’est vrai, mais avec une biodisponnibilité fort douteuse, donc cette source n’est pas viable. On te met une petite étude pas végane du tout ici (pauvres rats).
   Nous sommes tout à fait d’accord avec le doc cependant, lorsqu’il dit que les alternatives sont déjà en magasin, avec les ressources naturelles comme les lentilles, le soja, les haricots, des protéines végétales bonnes pour la santé, pour la planète et le porte-monnaie (cf. p.306) Car il n’y a pas que des produits transformés, des ersatz avec additifs dans la nourriture végane. Comme ailleurs il y a pléthore de produits de base que l’on peut cuisiner. Et si on faisait nos steaks végétaux maison ? Comme Gilles Luneau qui n’oublie jamais « la provenance de [sa] nourriture, [ce qu’il doit] quotidiennement à la nature. » (p.314), nous aussi mangeons varié et sain, et on aime aussi manger des trucs gras comme les chips, des machins apéro… mais Gilou, oh ma Gaïa !!!! je te dois tellement, tu me nourris, je te dois la vie… Non mais sans blague, t’es sûr que t’es pas un peu « végan », parce que des mystiques de pacotilles on en a tout un stock. Y en a même un qui veut créer une communauté avec des EXPERTS …en naturopathie, en iridologie, c’te bonne blague ; où quand les animaux ont bon dos… faire-valoir parfaits pour vendre son p’tit package yoga-méditation-développement personnel. Écœurant. À la même page le scribouillard en remet une couche sur la mort[19]. Comme si seul l’abattage d’un animal pour sa consommation permettait cette connexion avec l’inévitable fin de vie. Question anthropologique : Pourrait-on résoudre ce problème en « mangeant nos morts » ? Dommage Gilou, tu n’as pas croisé les bonnes personnes, on t’a perdu, mais pourquoi es-tu  allé voir des végans ricains gars, on était là nous. On picole un peu, on bouffe gras parfois, on s’est même remis à fumer une clope de temps en temps alors qu’on avait arrêté, parce que tu comprends le rock… tout ça… On sait qu’ils sont chiants ces « végans » qui mettent en avant leur alimentation crue, qui vont voir I. G. dès qu’ils ont une candidose, qui croient au pouvoir des pierres (nous on croit surtout au parpaing dans la g*****)… T’as merdé dans ton enquête, t’as vraiment merdé.
Steaks maison à base de champignons, oignons, gluten et épices pour le BBQ
   Il y a moult confusions dans ce livre. La critique du fait d’être totalement en forme mentale et physique pour la compétition professionnelle, pour être le plus productif au boulot, le plus adaptable aussi, car avec la précarité…[20] nous sommes tout à fait d’accord, c’est stupide. Mais quoi la simultanéité des deux courants, l’économie du bien-être et le bien-être animal, soi-disant annexés aux normes européennes qu’on oppose ici systématiquement aux récalcitrants du genre polyculteur-éleveur en biodynamie, agroforesterie et races locales, les végans se charger[aient] de les achever par la loi[21] ? À notre avis, c’est une erreur grossière que d’asserter que chez les végans il y a une part d’anthropomorphisme, et une idéalisation de la nature[22]. Justement c’est l’inverse. Conscient-e-s que la « nature » est une construction historique humaine, nous nous resituons au sein du maillage complexe des vivants dans les biotopes et l’écosystème, et surtout nous ne fermons pas les yeux sur cette réalité que les animaux souffrent et ont des intérêts propres à vivre, qu’on peut désormais bien se mourir et se vêtir sans les exploiter. C’est assez simple, et pourtant ça choque le commun des mortels qui ne veut pas abandonner les privilèges du spécisme et des consommations diverses tout à fait superfétatoires. Il ne s’agit pas de faire une ascèse quand on s’engage dans l’antispécisme et la défense des droits des animaux. Il s’agit de faire autrement. Autrement ça peut signifier arrêter de porter de la fourrure, ce truc tellement ringard. On voit bien qu’il n’y a presque plus rien à tirer de bon chez Gilles Luneau, lorsqu’il relaye Benoît Biteau (cf. p.352), un écologiste fier d’avoir participé à la mise au point du lapin Orylag®. Eh oui, la viande cellulaire c’est choquant mais pas de manipuler les lapins pour en faire une marque déposée gage de qualité pour leurs poils et leur viande. Non, pas choquant, surtout pas de la part d’un Biteau député Vert, ces mêmes Verts qui ensuite vont pleurer face au Géant Monsanto et ses semences OGM (les graines ne souffrent pas, elles). Les lapins Orylag® sont des OGM eux aussi. Pour eux par contre ça n’a pas l’air d’être la fête tous les jours comme le dit le bonhomme (info L214).
   On l’aura compris, le livre de Gilles Luneau Steak Barbare. Hold-up végan sur l’assiette ne reflète pas une réalité sociétale ni même civilisationnelle. Tout au plus l’auteur nous aide-t-il à mieux entrevoir les possibles alimentaires du futur proche qui aideront à réduire, et pourquoi pas on l’espère, cesser toutes formes d’exploitation animale. L’auteur ne prend finalement pas en compte les arguments des personnes qu’il a interviewées. Dès le départ son idée est de fabriquer des corrélations entre le militantisme pour la libération des animaux et les nouvelles technologies de l’industrie alimentaire dont les acteurs jeunes  et anciens du secteur, ont très bien compris les enjeux éco-sociobiologiques des prochaines décennies. Pour nous, il n’est pas question de priver autrui mais de proposer des alternatives éthiques qui satisfassent au bien-être commun. On en a déjà beaucoup parlé ici, on en reparlera encore. Finissons avec quelques mots de Luc Boltanski dans L’Amour et la Justice comme compétences : Pour faire une cité il ne suffit donc pas de se donner un ensemble de personnes. Il faut aussi définir un bien commun qui leur soit supérieur et qui puisse faire entre elles équivalence. C’est en prenant appui sur cette équivalence que pourra être établi le caractère juste ou injuste des relations qu’elles entretiennent les unes avec les autres […][23]. Pour nous le bien-commun est ce que nous partageons de toujours avec les animaux. C’est le fait de vivre. Nous voulons vivre bien. Ne doutons pas que très subjectivement, les autres animaux le veulent aussi. Qui sont les barbares ?
K&M
   [1] Steak barbare. Hold-up végan sur l’assiette, p.11.
   [2] Ibid., p.15 & p.17.
   [3] Tel Gallimard, et voir : « L’accroissement de la productivité économique qui, d’une part, crée les conditions d’un monde meilleur, procure d’autre part à l’appareil technique et aux groupes sociaux qui en disposent une supériorité immense sur le reste de la population. » (p.17) « L’assimilation des idées aux nombres qu’effectue le savoir mythique dans les derniers écrits de Platon exprime la nostalgie de toute démythologisation : le nombre est devenu le canon de l’Aufklärung. Les mêmes équations dominent la justice bourgeoise et l’échange des marchandises. » (p.25)
   [4] Abattoirs de Chicago. Le monde humain. Collection L’ombre animale. La Bibliothèque (2016)
   [5] Steak barbare. Hold-up végan sur l’assiette, p.23.
   [6] Ibid., p.76
   [7] Ibid., p.82
   [8] Ibid., p.83
   [9] Cf. p.110, p.120 & p.121.
   [10] Ibid. p.143. Sans compter que ces gens-là n’ont pas de terre sous les ongles comme disait P.-E. Rault : « Enfin, se mobiliser pour la cause animale comble l’envie de servir la nature de ces jeunes citadins sans culture rurale. » (p.137) Propos assez brillants dans le manque de lucidité, bravo Gilou.
   [11] Ibid., p.160.
   [12] Ibid., p.181.
   [13] Ibid., p.209.
   [14] Voir p.226 : N’étant pas accepté d’entrer lors d’une conférence de spécialistes, le journaliste écrit à propos d’une « paranoïa autour d’une journée d’étude à Paris « Agriculture cellulaire et alternatives aux produits lacto-ovo-carnés » ». « À moins que ce ne fût, je n’ose le croire, une opposition à ma personne, […] ». En cherchant sur le net, aucun organe de presse ne s’est fait le relais de cet événement, donc peut-être qu’effectivement, il n’était pas ouvert aux journalistes… Faut pas tout prendre pour soi Gilou…
   [15] Ibid., p.234.
   [16] Ibid., p.238.
   [17] Ibid., p.258. « À un passé qui s’invite joyeusement à table, le végan préfère brouter un futur fantasmé. » écrit G. Luneau p.262. On devine pour notre part la répulsion de l’auteur pour des gens ayant des prétentions qu’il n’aurait jamais été capable de formuler.
   [18] Ibid., p.264.
   [19] Voir p.327 : « : On refuse la mort, c’est la plus-value éthique de cette viande, mais est-elle encore une viande vivante ? », en référence aux travaux de J. Porcher. On a définitivement perdu le « seul être vivant métaphysique » de cette Terre !
   [20] Ibid., p.323
   [21] Ibid.
   [22] Ibid., p.334.
   [23] Op. cit. p.38 (1990 — Folio essais)

6 réflexions sur “DES INVASIONS CARNO-SPÉCISTES — POUR LE « STEAK BARBARE » DE GILLES LUNEAU — ÉGOISME INUTILE

  1. Merci et bravo pour cet excellent résumé. Honnêtement quel courage car rien qu’à la lecture de votre article, les arguments de ces défenseur de l’agriculture « locale » et « traditionnelle » me fatiguent. À vous lire, je trouverais cependant intéressant de faire une étude socio-psychologique, (comme vous dites pour la question du rapport à la mort) qui analyserait plus largement le rapport au temps, à la nostalgie qui mène à cette illusion qu’est la tradition. Tout comme la « nature » ou le contrat avec animaux sont des constructions mentales, cette valorisation de la tradition sélective (je vois mal Gilles luneau reprendre d’autres activités traditionnelles bien lourdes et bien chiantes) serait intéressante à étudier et à déconstruire. Car cette position, portée par l’écolo de base prend tellement d’ampleur qu’il faut maintenant trouver des arguments pertinents à ce nouveau type de « cri de la carotte ». Pour ma part, quand je vois que l’argument de l’individuation de l’animal ne marchera pas avec mon interlocuteur, je retourne à l’humain et au combat social. Si on se donne le droit de manger des animaux « heureux » (quel odieux concept) , tous les autres humains doivent avec la même possibilité. Sinon je reconduis des inégalités sociales insupportables. Or il n’y aura jamais assez de place sur terre pour soutient le modèle d’élevage que ces neo traditionalistes défendent. Donc non, pas d’œuf de poule heureuse si les potes des HLM de ma rue ne peuvent pas se les payer ou quand des millions de personnes meurent littéralement de faim parce que justement une minuscule part de l’humanité se croit en droit de défendre leur « tradition » (je vous passe l’étude systémique du système économique mondial qui nous a mené à cette cata).
    Bref encore bravo pour votre (et vos) articles qui, très égoïstement, m’évite de me taper la lecture de cette littérature anti – antispé. Tiens! Au fait, anti anti = pro. On va se faciliter la tâche, porchet et co sont tout simplement des pro spécistes!
    😁

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    1. Bonjour, merci pour votre retour qui fait plaisir. Nous rejoignons vos remarques bien évidemment. Le problème est complexe et requiert qu’on déconstruise bel et bien des pans entiers de nos structures sociales. Toutes les misères sont consubstantielles les unes aux autres. Le pro-spécisme est une pathologie parmis tant d’autres… Bien à vous. K&M

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  2. « Aux dix-mille ans de compagnonnage entre l’être humain et l’animal » Ah bah oui, bien sûr, mes compagnons de vie, je leur vole leurs enfants, je les traits et je leur tranche la gorge. Ils sont tellement contents de vivre avec moi que je les encercle avec des fils barbelés.

    Pour répondre à mes amis écolos qui prônent une agriculture paysanne et bio comme modèle, j’utilise une étude récente réalisée par les universités de l’UCL et de la KUL commandée par Greenpeace. Celle-ci imagine plusieurs scénario pour l’avenir de l’élevage en Belgique (hé oui, je suis belge). Parmi ces scénarios, le plus extrême imagine de passer tous les élevages à du 100% bio d’ici 2050.

    Cela impliquerait une diminution drastique de la production de porc, de poulets de chair et d’œufs (respectivement -91%,-92%, -90%), ainsi qu’une chute de la production de viande bovine (-50%). Mais le plus frappant est que ce scénario oblige une diminution de près de 70% de notre consommation de viande. Il faudra passer de 120g de viande par jour par belge aujourd’hui à 27g par jour! Oui…Un steak haché tous les 5 jours. Je vous laisse imaginer la tête de vos amis écolos. Un peu de cohérence. Sont-ils vraiment prêts à agir en accord avec leur modèle qu’ils chérissent tellement et diminuer autant le consommation pour que ce modèle soit viable? Et que devront-ils manger les 4 jours restants? Je vous le donne en mille… des plats vegan.

    lien:

    Cliquer pour accéder à Etude-macroeconomique-Rapport-v0606171.pdf

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